Reynerie, La rénovation urbaine au 21ème siècle

30 janvier 2025 - par Collectif de Radiographie Urbaine

En se promenant à Reynerie, un des quartiers du grand Mirail à Toulouse, on vous parle du grand d’Indy et du Petit Varèse, de Messager et d’Oriacombe, de Gluck, Poulenc et Cambert. On se rappelle le grand Varèse qui est tombé et on vous montre Jean-Gilles qui a été refait… On pourrait se croire dans un film des années 50 avec Prévert ou Audiard aux dialogues. Mais c’est d’immeubles dont il est question ici, et d’un quartier populaire qui fait face, depuis plus d’une vingtaine d’années, à une transformation agressive. Retour historique et promenade avec Karine, une habitante qui résiste à son expropriation.

Y’avait 270 foyers ici, y’en a que 16 qui s’opposent, ce ne sont pas les 16 qui vont faire la loi. (…) Je suis mandaté pour que les institutions mènent à bien leur projet parce que c’est le mandat populaire que nous avons reçu par le vote. Tant que nous sommes en démocratie ce sera comme ça. J-L Moudenc, 23 mars 2022 [1]

Le quartier monte au ciel, massif, tout en béton [2]. Ses plaies sont visibles : des chantiers ouverts, des appartements fermés, et ses habitant·es progressivement poussé·es dehors. « Dans 20 ans ce sera la Reyne-elle-pleure, on sera plus là, ce ne sera plus le même décor » [3]. Pour comprendre ce qui se joue aujourd’hui dans les années 2020, il faut remettre le quartier dans sa courte histoire et remonter aux années 60. La municipalité est alors engagée dans un projet de développement caractérisé par la politique dite des « métropoles d’équilibre ». Une politique d’aménagement du territoire qui est censée pallier à la disproportion entre Paris et le reste de la France. Il faut capter des entreprises et des habitant·es pour se hisser au niveau d’une capitale [4].
Reynerie est l’un des trois quartiers historiques du « projet Mirail », avec Bellefontaine et Mirail-Université. Au départ, il y a un maire « bâtisseur », qui veut doubler, au propre comme au figurée, la vieille ville d’une autre, moderne et rayonnante. Louis Bazerque, le maire de service, l’appelle « Ville Miroir », le Mirail en occitan. La modernité d’alors est synonyme de béton et il faut loger les masses. Entre autres projets, l’idée d’une « ville nouvelle » de 25 000 logements et 100 000 habitant·es est dans les cartons. Elle doit s’étendre sur plus de 200 hectares. Et en proportion c’est effectivement presque l’équivalent de la ville historique, mais avec une réflexion d’ensemble qui est censée produire l’harmonie.

Reynerie - Vue sur les pyrénnées - 2024
Photo Laure

Le Mirail : bâtir la vie

Des architectes audacieux et utopiques remportent le concours : Candilis, Josic et Woods. « Nous avons essayé de faire un quartier de Toulouse, ni grand ensemble, ni ville nouvelle » [5] affirme le premier en 1970. Le Mirail ne doit pas être une banlieue, mais un vrai centre. Les concepteurs affichent une préoccupation humaniste : la dalle et les coursives en sont l’expression architecturale. La dalle permet en effet une circulation piétonne dans l’ensemble du quartier et les coursives installent des rues aux 5ème et 9ème étages. Il s’agit, pour les concepteurs, rien de moins que de « réinventer la rue » en la délivrant de l’emprise de l’automobile, afin de lui redonner sa fonction de lien et d’espace de rencontre. Les appartements ne sont pas en reste, traversants, ils sont spacieux, lumineux et aérés. La qualité de l’habitat doit mettre le logement social à la hauteur d’un logement de standing.
Enfin, les quartiers peuvent bénéficier de nombreux espaces verts, d’un parc avec un lac (à Reynerie justement), des équipements culturels et de nombreux commerces. On y construit aussi des écoles primaires, des collèges, une université, une école d’architecture. Des zones d’activités alentours doivent garantir la possibilité de l’emploi. Lire le discours tenu à l’époque par ses promoteurs est éclairant sur l’ambition qui s’y logeait.

« On s’est attaché ici à recréer à l’échelle contemporaine le tissu urbain de la vieille ville. Puisque l’homme, aujourd’hui, c’est aussi une voiture, on crée des autoroutes urbaines, des parkings, une partie en sous-sol, sous une dalle de béton. En surface, au soleil, cette dalle constitue une vaste voie piétonnière qui se développe sur 5 km et qui restitue à la rue sa fonction originelle oubliée depuis le Moyen-Âge. C’est à partir de ce lieu privilégié d’échanges et de rencontres que naissent toutes les activités urbaines : habitations (immeubles collectifs et pavillons individuels, au total 23 000 logements), commerces, centres administratifs et sociaux, écoles et facultés, sports et loisirs.
Et puisque le piéton c’est la vie, on lui ménage des promenades ombragées (95% des arbres ont été conservés), on met en eau de véritables lacs.
Ainsi le Mirail, échappant “aux sucres de béton, aux dominos” d’un urbanisme dépassé, est-il en train de gagner ce pari : offrir à 100 000 habitants de vivre en liberté. » [6]

Team X posant devant le Mirail, Candilis au centre Avril 1971

Le chantier commencé en 1964 n’arrivera pas au bout de l’ambition planifiée. Il devient casus belli de la campagne municipale de 1971 : « Le Mirail est un satellite sans âme imposé d’autorité aux portes d’une cité souriante. Il est urgent de rentabiliser le Mirail... » proclame André Turcat, le futur adjoint de Pierre Baudis [7]. En effet, le projet attaque directement la rente foncière en limitant administrativement les constructions hors du Mirail. Dès 1974, la dalle subit de premières démolitions et le projet d’ensemble est abandonné pour des projets partiels confiés à de la promotion privée, ce qui correspond aussi au souhait de l’État de privilégier le pavillonnaire et l’accès à la propriété. Fin d’une époque.

Un quartier sous pression

Le Mirail va connaître des crises multiples. D’abord, il y a les mécanismes du marché et du logement social qui concentrent les richesses comme la pauvreté. Mais à cela il faut ajouter le racisme qui traverse la société française et la gestion policière de la question sociale. La dalle et les coursives ne sont pas pratiques pour les patrouilles des forces de l’ordre. Le quartier est un labyrinthe et les jeunes stagnent dans les coins, le quartier commence à se faire une réputation. Alors, les coursives sont murées, la dalle est démantelée par morceaux. Les commerces de proximités sont nombreux à fermer victimes à la fois des faibles revenus de la population et de la concurrence des hypermarchés.
Il y eut pourtant dans les années 80 le festival Racines qui avait une notoriété importante et drainait des gens de partout autour du lac de la Reynerie. Mais le festival n’arrive pas à se maintenir au-delà de 1994 et c’est peut-être un moment de bascule. Le métro arrive au cœur du quartier en 1993, mais rien n’y fait : chômage, discriminations, manque de perspective, bref « la galère » s’installe et le mépris s’accumule. Peut-être que l’un des points marquants de cette époque c’est la mort de Habib Ould Mohammed, dit « Pipo », touché par le tir du brigadier Henri Blois. Il sera abandonné par la patrouille et mourra de ses blessures, le 13 décembre 1998. Il avait 17 ans. Le quartier s’enflamme pour quatre jours d’émeutes mémorables. Et pour ceux qui y ont participé ce n’était pas qu’une réaction, c’était vital : « Le seul moyen pour ces gens-là de penser et de comprendre notre souffrance, qu’ils n’avaient pas tué un chat ou un chien, c’était de réagir. » [8]
Deux ans plus tard, en septembre 2001, c’est l’explosion d’AZF [9], les quartiers prennent de plein fouet le souffle de l’explosion qui fait de nombreux blessé·es. La gestion de la catastrophe sera marquée par le mépris, on se souvient encore de l’arrivée des CRS avant les équipes de nettoyage. À certains endroits, c’est du plastique noir qui fera office de fenêtre en attendant que le problème soit réglé. Deux ans après, en 2003, on en voyait encore sur certaines barres.
En 2002, le coup est plus discret mais il aura des conséquences à long terme. L’État, la mairie, la région, le département et les bailleurs signent la première convention dans le cadre du Grand Projet de Ville (GPV). C’est le début d’un projet de « renouvellement urbain » qui, sous diverses formes, s’étend jusqu’à aujourd’hui et bouleverse en profondeur la vie du quartier, en chantier depuis vingt ans. Si, dans un premier temps, les déménagements se sont fait plus ou moins à l’amiable, la situation se durcit de plus en plus et la violence sociale induite par la rénovation augmente. Le traitement dont ont fait l’objet les collégien.nes du quartier [10] lors de la fermeture de leurs collèges montre la violence réelle et symbolique de cette politique.

Reynerie - Vue des coursives - 2024
Photo Laure

L’organisation de l’abandon

En 2018, lors d’une session de porte-à-porte avec un collectif de voisins, dans l’objectif, sensibiliser les personnes à la démolition prochaine des immeubles et tenter de fomenter une mobilisation. Nous rencontrons une personne à d’Indy. Elle raconte son attachement au quartier, mais aussi les nombreuses difficultés vécues. Elle espère que les démolitions vont lui permettre d’avoir un appartement plus adapté à ses besoins et en meilleur état. Elle se dit fatiguée, déprimée et pourtant elle l’aime son quartier.
« C’est vrai que j’étais contre qu’ils détruisent le bâtiment, parce que moi, c’est vrai, je suis née ici j’ai grandi ici, j’ai déménagé, je me suis mariée, j’ai eu des enfants, j’ai déménagé, j’ai re-déménagé, je suis revenue dans mon quartier, donc bon c’est vrai que c’est un quartier, c’est comme si que, je me sens chez moi. Ensuite, c’est un quartier où tout le monde se connaît. On est comme une famille. Mon voisin pour moi c’est comme mon frère. On est bien ensemble. Si quelqu’un a un problème toute le monde se lève avec lui. C’est chaleureux, convivial, on est bien dans notre quartier. » Pourquoi alors accepter la destruction ? Parce que c’est une promesse d’amélioration et le signe que peut-être, cette fois-ci, les bailleurs vont s’occuper de l’appartement qui se dégrade.
« Y’a un moment ils ont dit qu’ils allaient refaire des travaux, qu’ils allaient rénover, patati patata… mais il n’y a pas de changement ! Ils ont touché à rien. Moi je, dans ma chambre les habits ils sont congelés, tous les jours quand je les mets on dirait qu’ils étaient dehors. J’ai beaucoup de moisissure. Et ensuite, ils ne font qu’augmenter le loyer, augmenter les charges, moi j’arrive plus à payer le loyer, je m’en sors plus… » Le logement social est une mise sous tutelle où il est très difficile, si ce n’est par la lutte collective, d’obtenir des améliorations. Sinon c’est la débrouille individuelle qui, si elle améliore la situation, n’est pas simple.
« Ils s’en foutent, ils s’en foutent complètement. Pour nous, on a un logement, on est obligés de payer le loyer, et on se tait. Voilà. Mais non. Je suis désolé. On a une âme aussi, on a un cœur et on souffre de l’intérieur. Oui on souffre. Mais franchement un jour ou l’autre ils vont le démolir, quand, ils vont être obligés de le démolir. Le bloc où nous sommes, franchement il faut, il faut y vivre pour comprendre. Faut passer une nuit. Quand le vent s’infiltre. Il y’a des trucs qui ont bougé et on les a un peu, rafistolé mais il n’y a pas eu de vrai travail pour que ça soit bien isolé. »
Ce témoignage en recoupe d’autres qui font référence à la catastrophe d’AZF, qui a compromis sérieusement l’étanchéité des fenêtres et de certaines cloisons. Si certaines barres ont été rénovées d’autres ont été juste rafistolées, laissant les habitant·es se débrouiller. Cette situation tape sur les nerfs, et constitue une pression silencieuse au départ, qui n’est pas sans rappeler celle qui s’exerçait sur les habitant·es du quartier Saint Georges [11].

Reynerie - Caddie collectif - 2024
Photo Laure

Partir c’est mourir un peu, rester c’est souffrir beaucoup

En mars 2022, nous visitons le quartier avec Karine. Elle le connaît bien, sa mère a acheté en 1979 un appartement à Messager, l’un des immeubles Candilis. Désormais c’est elle qui en est propriétaire et elle est l’une des résistantes à l’expropriation. En venant du métro Mirail-Université, elle m’indique le jardin partagé sur l’emplacement du grand Varèse, la nouvelle médiathèque et la nouvelle école. Et puis c’est la litanie de la vacance qui commence. Pour Gluck c’est plus de 180 logements qui sont vides, à Grand d’Indy on en compte 220 et Messager est lui aussi déserté. Et les vitres cassées des appartements donnent un air fantomatique et inquiétant. Il y a aussi Cambert, récemment rénové, mais également promis à la démolition en 2024 ! Ça l’a bien fait rire, Karine, de voir ma mine déconfite. Et elle ajoute que c’est pareil chez elle. Le bailleur, principal propriétaire, a fait voter des travaux en juin 2010, pour une remise aux normes électriques et l’isolation des pignons, et a annoncé la démolition six mois plus tard. À l’époque le « plan de sauvegarde » à l’étude va conclure à la nécessité de la démolition, la rénovation étant trop chère pour les habitant·es. La barre va être progressivement vidée, jusqu’à aujourd’hui où seuls 16 appartements restent occupés par leurs propriétaires qui résistent encore.
Selon Karine, les habitant·es qui n’ont pas « la chance » d’être relogé·es à proximité sont : « dispersé·es à Colomier, Blagnac, Balma, Cugnaux, Tournefeuille, Plaisance, Portet, Muret, voire même Cazères et Pamiers ! Des personnes qui au bout de deux ou trois mois, voyant qu’ils n’ont plus de transports, de commerces ou de relations de voisinage, demandent à revenir ». Une minorité d’entre eux a été relogée au domaine du Lac : « c’est la nouvelle façon de construire, maintenant, on fait des cubes ». C’était prévu pour de l’accession à la propriété mais personne n’a acheté, alors c’est de la location. Les appartements sont plus petits et plus chers. L’un des leviers pour empêcher les gens de rester c’est en effet de ne plus produire de grands appartements. « Il n’y a plus de T5 quasiment, enfin si, il y en a, mais dans les barres promises à la démolition ». Et Karine de rigoler devant l’absurdité de la situation. Ce n’est pourtant pas très drôle ce qu’il se passe, « on est en travaux depuis 22 ans, avec les machines, les gravats, la poussière… et quand le vent se lève comme aujourd’hui c’est pénible. »
Il lui en faut du cran pour tenir tête. On lui a proposé 1031 euros du mètre carré quand les appartements neufs (les fameux donc) se vendent à 2300€ du m2 dans la même zone. Et encore l’offre a augmenté de 200 euros depuis 2017. Entre temps, la méthode est simple et a fait ses preuves : laisser pourrir et faire pression. Elle me montre les portes qui ne ferment pas, les traces d’incendies, la saleté des parties communes, les boîtes aux lettres défoncées par les descentes de flics. Pour elle, l’office HLM des chalets (propriétaire principal) a sciemment laissé les appartements être squattés pour ensuite mener une grande opération d’expulsion en demandant aux forces de l’ordre de casser les baies vitrées. Enfin, le bâtiment de quinze étages n’a plus qu’un seul ascenseur qui fonctionne, sur les trois existants, et il est fréquemment en panne, condamnant les habitant·es les plus âgé·es à un confinement forcé. Pour Karine, « le mode opératoire pour intimider et menacer les locataires a fonctionné jusqu’en 2017, les bâtiments ont pu être démolis, sauf le petit Varèse. Et ensuite ils ont été confrontés à la résistance de Messager ». Qu’à cela ne tienne, les pouvoirs publics font traîner en longueur, soumettant le quartier à un lent pourrissement.

Reynerie - Reste de la dalle - 2024
Photo Laure

Cités et démocratie

Depuis plus de 20 ans que le quartier est en chantier, Karine a vu beaucoup de PowerPoint et assisté à de nombreuses réunions de « concertation ». Elle évoque le flou des décisions qui changent, le mépris, les consultations qui n’en sont pas et les sujets impossibles à mettre sur la table. La rénovation des barres en particulier, aujourd’hui (en 2022) portée par un collectif d’architectes qui avancent des arguments patrimoniaux et écologiques : Candilis c’est tout une histoire et la rénovation c’est moins cher au vu du coût final et écologique. Mais ce n’est pas l’avis de la mairie qui ne voit là qu’une opération immobilière au mépris d’une prise en compte globale. Le terrain est devenu une véritable mine d’or. Avec le métro, nous sommes à 20 minutes du centre-ville et l’accès à la route est lui aussi facilité, « on ne peut pas faire mieux » soupire Karine. Ce secteur peut devenir une première couronne très prisée dans une agglomération qui s’étend toujours plus. Bien entendu, si on prend en compte la construction et l’empreinte écologique dans le calcul, c’est une toute autre histoire, d’autant que ces bâtiments sont plutôt simples à rénover. Mais c’est aller à l’encontre d’un discours dépréciatif construit depuis des décennies : le problème de ces quartiers, c’est le béton. Déjà en 2014 l’université du Mirail avait choisi de changer de nom pour ne pas être « associée à un échec » [12]. Cela faisait notamment écho à un article du Monde qui évoquait la « désillusion » [13] du Mirail. Et fidèle à la figure socialiste de la région qui disait « Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots », l’université s’est rebaptisée Jean Jaurès.
On a donc voulu imputer aux constructions les problèmes sociaux des habitant·es, alors qu’il ne faut pas avoir fait un doctorat de sociologie pour comprendre qu’avec plus d’argent et moins de racisme ces quartiers auraient eu un autre destin. C’est d’ailleurs l’avis du commissaire enquêteur de l’enquête publique portant sur le projet de renouvellement urbain du quartier Reynerie, en 2017 : « Les études ont malheureusement négligé les aspects socio-économiques de l’habitat pour privilégier l’urbanisme et l’environnement qui sembleraient les seules options pour une requalification du quartier » [14]. Il avait donc donné un avis défavorable et demandé que les démolitions soient stoppées, trouvant que la volonté exprimée « d’adoucir le paysage urbain » ne valait pas les nuisances provoquées sur le plan humain. Et d’ajouter que « après dix ans d’aménagement, force est de constater que la diversification de l’habitat via l’accession sociale n’a pas fonctionné et ne fonctionne toujours pas. Les niveaux de revenus des habitants sont toujours aussi faibles et ces locataires auront toujours des difficultés à se loger ailleurs que dans ces immeubles où les loyers sont les plus bas. » Qu’à cela ne tienne une nouvelle enquête publique est commandée en 2021, et elle donnera cette fois un avis favorable.
Gaëtan Cognard, l’adjoint au maire en charge du quartier ne dissimile pas ses ambitions : « On ne veut pas forcément faire les mêmes erreurs que dans les années 70 en ne misant que sur l’habitat. J’ai envie qu’à l’avenir la Reynerie soit ’The Place to be’ et que tous les Toulousains y viennent. » [15] Et de promettre une maison pluridisciplinaire de santé, une cité de la danse et une base nautique sur le lac qui deviendrait baignable. Le « renouvellement urbain » est un renouvellement humain, un déplacement de population pour aboutir coûte que coûte à l’effacement de ce quartier populaire. Encore une fois, l’histoire se répète [16]. Décidément la modernité ne veut pas de nous.
Pour la prochaine livraison nous changerons de format pour écouter un documentaire sonore qui résonne beaucoup avec cette situation et d’autres déjà décrite. « Personne ne souviendra de nous »

[1La dépêche 23 mars 2022 : « Toulouse : François Ruffin, Jean-Luc Moudenc, le face à face à la Reynerie »

[2Cet article a été publié dans une première version plus courte dans l’empaillé sous la signature JK, il a été repris et augmenté par le CRU pour cette publication.

[3Sonia Abdallah dans les Splendides, court métrage de Meryem-Bahia Arfaoui.

[4Voir publié précédemment Toulouse, une métropole en projet.

[5Vingt-quatre heures sur la deux, 19 mars 1970 : « George Candilis, architecte du Mirail » (archives INA)

[6Brochure publiée en mars 1971 par la Société d’Équipement de Toulouse Midi-Pyrénées (SETOMIP) sous le titre « Toulouse Accueille les industries nouvelles ». Ce livret de moins d’une vingtaine de page était destiné à promouvoir l’agglomération auprès d’industriel pouvant s’installer dans la ville.

[7André Turcat, pilote d’essai du Concorde futur adjoint au logement de Pierre Baudis, qui ravira à Louis Bazerque la mairie de Toulouse. Voir M.C. Jaillet, Mohamed Zendjebil, « Le Mirail : un projet de “quasi-ville nouvelle” au destin de grand ensemble » Histoire urbaine n°17, 2006.

[8Chouf tolosa 10 juin 2019 : « Habib « Pipo », 20 après.

[9Le 21 septembre 2021 à 10h17 300 à 400 tonnes de nitrate d’ammonium explose sur le site de l’usine AZF, propriété de Total, au sud de Toulouse soit à 2 km du quartier qui fût l’un des plus touchés. Voir les témoignages enregistrés 15 ans après l’explosion sur ce site.

[12JM Minovez, alors président de l’université du Mirail s’adressant à l’hiver 2014 à la communauté universitaire. Il faut noter que l’université, construite également par Candilis, sera aussi rasée et reconstruite sur du partenariat public-privé au grand bénéfice de Vinci. Mais ça c’est une autre histoire.

[13Le Monde 13 février 2014 : « Le Mirail de l’utopie à la désillusion ».

[14L’enquête publique de 2017, « projet de renouvellement urbain du quartier de Reynerie à Toulouse » – Dossier T.A. n° E17000091

[15Actu Toulouse du 13 janvier 2022 : « Toulouse : Démolitions, nouveaux immeubles, commerces : au Mirail, comment la Reynerie va se transformer ».

[16Et pour sortir d’un prisme local voir Tenir la Ville : luttes et résistances contre le capitalisme urbain. Par le Collectif Asphalte publié en 2023 par Les Étaques. En particulier l’article de C. Reveillere « Dans les quartiers populaires, armer nos luttes face à la rénovation urbaine » disponible en ligne