Mettre la rue en ordre : 2. La bataille du centre-ville

16 janvier 2025 - par Collectif de Radiographie Urbaine

Si la rue Alsace Lorraine a été constituée par et pour le commerce, comme grande artère centrale elle a toujours été un axe important pour les manifestations. Sans surprise, lors des différentes phases de construction et de rénovation dans les années 2000, cette pratique n’a pas été prise en compte par les aménageurs, produisant des « conflits d’usage » pour reprendre leurs mots. Nous cherchons ici à comprendre de quelle manière nous pouvons à la fois avoir une lecture politique de ces conflits et d’autre part ce que cette gestion de l’espace nous dit de la politique métropolitaine.

Contrôler l’espace urbain, c’est parvenir à en déposséder le peuple, en finir avec cette exubération dangereuse des groupes et des foules, donner à chacun une place qui soit enfin limitée. Mais rendre le peuple étranger à son propre domaine, voire à sa propre culture, n’est pas chose si simple.
A la fin de l’Ancien Régime, l’enjeu est vital pour le peuple comme pour la police. Ce sera vrai du 19ème siècle aussi. De 1936 comme de 1968. Prendre la rue est une évidence révolutionnaire, un geste familier. D’ailleurs s’agit-il vraiment de la prendre cette rue, le peuple l’a-t-il réellement quittée ? La rue n’est pas seulement un mythe, elle est surplus de vie, moyen de lutte, espace d’affranchissement. [1]

Dès la première rénovation en 2007, l’aménagement va rendre difficile le passage des manifestations. En coupant la continuité de la circulation sur l’axe, le passage des véhicules est entravé, en l’espèce les camions portants les sonos et les éléments plus visibles des centrales syndicales. Cela a pour résultat le déport des manifestations sur les boulevards qui entourent l’écusson central. À peu près dans le même temps, la multiplication des évènements sur la place du capitole impliquant sa quasi-fermeture tend également à en expulser les rassemblements. En 2012 une manifestation contre le mariage pour tous obtient encore l’accès à la place du Capitole, mais cela relève déjà de l’exception. Cette exclusion va se faire progressivement et sans réelle justification, dans une logique de répartition fonctionnelle des espaces dans une société pacifiée : sur les boulevards les protestations encadrées et dûment déclarées, au centre le commerce et ses animations. Dans ce cadre le divertissement est central, on revient aux racines lointaines d’un pouvoir qui se légitime en offrant un moment de plaisir. L’occupation de l’espace public par l’amusement n’en est pas moins une censure, une occupation préventive, qui met à distance les présences dérangeantes [2].
Il faut replacer ces transformations des parcours dans une dynamique de pacification [3] qui s’accentue au moins depuis 2007 [4]. Arrestation pour graffiti en pleine manifestation par des agents de la Brigade Anti Criminalité (2010), pratique du « glissement » [5], nasse d’une manifestation (2011) [6], opposition au départ de manifestations. Ces signaux sont cantonnés à la pratique et invisibles pour ceux et celles qui n’y participent pas. C’est lors des manifestations suite à la mort de Rémi Fraysse, à l’automne 2014, que va émerger un discours explicite sur l’usage du centre, un discours qui se reproduira, les mêmes causes produisant les mêmes effets, lors des manifestations des gilets jaunes à partir de décembre 2018 [7].

1er acte, novembre 2014 : une ZAD en centre-ville

Dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, à quelques kilomètres de Toulouse, Rémi Fraysse s’écroule, une partie du cou arraché par une grenade tirée par le gendarme Jean-Christophe Jasmain, alors que depuis quelques mois la tension monte sur la zone de Sivens, non loin de Gaillac où un projet de barrage menace une zone humide. Comme à Notre dame des Landes, contre le projet de second aéroport de Nantes, la protestation a pris corps dans une zone à défendre sur le site même des travaux. Dès le dimanche soir, à l’annonce de sa mort, une manifestation spontanée s’élance de la préfecture et traverse le centre-ville. Mais c’est le samedi suivant, 1er novembre 2014, que commencera une série de manifestations du samedi qui vont déborder le cadre établi et aussi montrer les contours d’une stratégie jusque-là discrète.

Place du Capitole Toulouse 28 octobre 2014
Photo issue du site Subversiones. Ce jour le rassemblement pour Rémi Fraisse coïncide avec un rassemblement pour les 43 étudiants disparus le 26 septembre 2014 à Ayotzinapa au Mexique.

Le rassemblement du 1er novembre réunit près de 2000 personnes sur la place du Capitole. Comme c’est souvent le cas quand un rassemblement est massif, les personnes assemblées décident de former un cortège. Le départ est impossible, la quasi-totalité des issues de la place est fermée par des gardes mobiles. Quelques grenades lacrymogènes sanctionnent les tentatives de sortie de la place par le cortège. La seule possibilité est alors de s’engouffrer dans le réseau de petites rues de l’hyper centre. Le cortège cherche à rejoindre de plus grands axes pour être visible, mais un imposant dispositif policier l’en empêche. Très vite l’ensemble du cortège est noyé dans un déluge de gaz et se disperse en groupes épars. Dès lors la manifestation prend un caractère singulier :
  un sitting prend forme place Rouaix, face à la chambre de commerce et d’industrie, des chants résonnent, « on tient la rue » ;
  Des vitrines de banques et des abribus tombent quai de Tounis et place Esquirol. Quelques jets de projectiles sur la police qui n’a toujours pas cessé ses tirs divers de balles de gomme, de lacrymogènes ;
  Des groupes dispersés exprime leur colère de diverse manières, la manifestation est partout, il est de plus en plus difficile de distinguer ceux et celles qui y ont pris part depuis le début et les passant.e.s. Les forces de l’ordre ne font d’ailleurs aucune différence, tout ce qui ne porte pas d’uniforme est un ennemi potentiel. Le gaz ne connait pas de frontière d’âge ni de classe, l’égalité républicaine réalisée par les compagnies de sécurité du même nom [8].
S’en suivra un usage très important de gaz lacrymogène dans l’ensemble du centre-ville, des courses poursuites et des arrestations. Ces arrestations donneront lieu à des gardes à vue et des jugements expéditifs dès le lundi. Ce schéma - tentative de cortège, dispersion, multiplication des points de conflictualités, répression avec gazage massif, arrestations, gardes à vue et comparutions immédiates - se reproduira tout au long du mois de novembre. À la mi-décembre un collectif antirépression fait le bilan de la répression et compte : 50 mois de prison, dont la moitié ferme, 210 heures de travaux d’intérêts généraux et plus de 10 000 euros d’amende pour une cinquantaine de personnes arrêtées [9].

Dispositif policier entrée de la rue Saint Rome, 28 octobre 2014.
Le mélange Brigade Anti-Criminalité et Compagnie de Sécurisation et d’Intervention (reconnaissable à leur bande bleue) est un attelage devenu courant dans le maintien de l’ordre, mais qui était alors en phase de test. Photo Subversiones

Tout au long de ce mois de novembre tumultueux, les commerçant·es du centre-ville ont été abondamment sollicités par les médias pour exprimer qui son désappointement, qui sa colère ou qui encore son manque à gagner. Le 21 février 2015, une nouvelle manifestation en réponse à la mort de Rémi Fraysse et contre le barrage du Testet va être le prétexte à un déferlement de critiques.
« Exaspérés, traumatisés même par les incidents violents qui ont provoqué la destruction de 23 vitrines lors de la manif des opposants au barrage de Sivens, le samedi 21 février, et abouti à une vingtaine d’interpellations de casseurs, les commerçants demandent au préfet « de ne plus autoriser les manifestations en hypercentre et de les dévier systématiquement sur une zone n’affectant pas le commerce du centre ». La dépêche 02 mars 2015 [10]
Le soir même, le maire de Toulouse Jean Luc Moudenc réagi déclarant que « Toulouse ne peut plus vivre au rythme de ces casseurs qui prennent notre ville pour un champ de manœuvres où pourraient être impunément brisées des vitrines et pillés les commerces. » [11]. Les commerçant·es évoquent la nécessité de se défendre par eux-mêmes face aux manifestant·es. « Dans l’avenir, si vous et vos services n’étiez pas en mesure d’assurer la sécurité de nos biens et de nos clients, nous serions contraints de nous organiser pour défendre nous-mêmes la ZAD de l’hypercentre de Toulouse contre toute agression extérieure » [12]. Dans cette lettre adressée au préfet, l’évocation de la formation d’une milice fait alors échos à l’organisation, au même moment, de groupes de choc par les agriculteurs autour de la ZAD de Sivens [13]. Dès cette époque le centre-ville de Toulouse sera interdit aux manifestations par un déploiement important de forces de l’ordre. Les manifestations contre la loi travail en 2016 donneront à voir l’extension du dispositif à toute manifestation dès lors qu’elle n’est pas encadrée par des syndicats. Cette sanctuarisation d’un centre-ville commerçant n’est pas propre à Toulouse, on l’a vu aussi se produire à Rennes [14]. Le conflit ouvert par la mobilisation des gilets jaunes va écrire un nouveau chapitre de cette dispute pour et dans l’espace.

Manifestation des Gilets jaunes, centre ville, 11 mai 2019.

Acte 2, novembre 2018 : « on est là ! »

Partie de l’occupation dans les périphéries, de centres commerciaux, d’échangeurs autoroutiers, de rocades et de ronds-points, le 17 novembre 2018 la mobilisation des Gilets jaunes va très vite gagner les centres des villes en se réunissant pour manifester les samedis. Cette pratique d’abord complémentaire des installations plus permanentes sur des ronds-points va devenir le moment d’apparition principal du mouvement après l’évacuation de ces derniers à la mi-décembre 2018. À Toulouse, à partir du 1er décembre, chaque manifestation va devenir un moment de conflit intense. Pendant des années les pouvoirs publics ont tenté de casser une tradition bien ancrée dans la ville de non déclaration des manifestations. Multipliant les répressions violentes et spectaculaires pour empêcher la formation de cortèges sans autorisation, ceux-ci terminant par prendre la dénomination de « manif sauvage ». Les manifestations du samedi des gilets jaunes vont systématiquement refuser de se déclarer. De fait, les parcours de manifestations vont sortir des cadres établis et, notamment, revenir dans l’hyper centre commerçant. Dès lors, le conflit qui s’était révélé en 2014 repart de plus belle : à qui et pour qui est le centre-ville ?
Le maire de la ville, Jean Luc Moudenc toujours, endosse très vite sa tenue de défenseur de la ville et des commerçant·es. Si dans un premier temps les rappels à l’ordre visent principalement les destructions constatées le long des cortèges, très vite la question des commerces devient centrale. Ainsi, dès janvier, le maire lance un appel aux Toulousain·nes pour qu’ils « n’achètent pas sur internet et Amazon » [15]. Tout en proposant un soutien massif aux commerces, il insiste pour que les manifestations s’arrêtent : « La répétition des manifestations le samedi a pour effet de tarir la clientèle du centre-ville. Elle met en danger l’activité économique et la viabilité de nombreux commerces du centre-ville, pour lesquels je proposerai que la Mairie de Toulouse décide un plan de soutien de près d’un million d’euros lors d’un Conseil Municipal extraordinaire, le 8 février prochain [2019]. » [16]

Annonce presse du 15 mai 2019.

De leur côté, des commerçant·es vont à nouveau agiter la menace de l’autodéfense, et ce dès le mois de décembre, où Jean-Marc Martinez, président de la fédération des associations de commerçants, artisans et professionnels de Toulouse menace que « la violence pourrait changer de camps » [17]. Les annonces de l’impact économique dans cette période de Noël sont proprement apocalyptiques, sous couvert d’anonymat un « commerçant de la rue Alsace Lorraine » s’exprime sans fard : « certains commerçants n’ont aujourd’hui plus rien à perdre et pourraient se faire justice eux-mêmes à force de perdre les nerfs. “Je connais des commerçants qui ont tout perdu”, explique-t-il. “Et quand quelqu’un est à la ruine, cela peut très mal finir. On peut déjà compter 200 dépôts de bilan et près de 800 licenciements. Et des Gilets jaunes voudraient encore manifester en ville ? C’est un miracle s’il n’y a encore rien eu de grave à Toulouse. Le préfet est prévenu” » [18].
Nous sommes alors à l’acte VII d’un drame qui en comptera près d’une trentaine et force est de constater que les postures dramatiques prises par certains ne se sont pas vérifiées. Les commerçant.es n’ont pas pris les armes et le centre-ville de Toulouse n’a pas été déserté ni par les commerçants ni par les chalands après plus de deux ans de manifestations. Il faut préciser que les associations de commerçant·es ont eu, contrairement aux Gilets jaunes, largement gain de cause. La ville a alloué plus d’un million d’euros d’aide et d’abattement sur différentes taxes et donné la possibilité de multiplier les évènements commerciaux. Notamment une grande braderie au mois de juin 2019 présentée par une commerçante comme une « opération de réappropriation du centre-ville par les Toulousains et les commerçants. Il y a des stands devant les magasins plus pour attirer les gens, mais c’est surtout pour le côté festif » [19]. Il faut ajouter que la préfecture avait fait de la non intrusion des manifestant·es en centre-ville sont objectif principal. Le préfet Guyot se félicitera de la pleine réussite de cet évènement : « J’ai vu les commerçants. Ils étaient ravis de la grande braderie » [20].

Place du Capitole 19 janvier 2019.

Effacer et proscrire

D’une certaine manière, il y a là la co-production d’un ordre légitime. Il s’agit d’une part, d’affirmer l’illégitimité de la présence des manifestations en centre-ville et d’autre part de légitimer l’action des forces de l’ordre dans la répression de celles-ci. Par ailleurs, un autre élément vient informer l’enjeu de la bataille en cours : les stratégies d’effacement de la mairie de Toulouse.
En effet, le mouvement des gilets jaunes, qui comme chacun sait a refusé toute représentation, s’exprime beaucoup par l’intermédiaire des graffitis. À tel point que la reprise des graffitis dans les médias pour exprimer les « revendications » est devenue une habitude. Déjà le mouvement de 2016 avait exprimé la même tendance. Là aussi, nous avons à faire à une pratique combattue de longue date et pas seulement dans les manifestations. Toulouse est une des villes qui dépense le plus pour l’effacement des écritures urbaines en France [21]. Le nettoyage des rues après le passage des manifestations va être une priorité absolue. Dès le dimanche matin, les équipes municipales s’attachent à censurer toute l’expression politique de la veille. L’action est d’autant plus frappante qu’elle vise des panneaux en bois, destinés à protéger les vitrines des banques et des sociétés d’assurances et qui sont, par nature, voués à disparaître. En sorte que le nettoyage, fait sous couvert de lutte contre la dégradation et la propreté, prend ici tout son sens. Il s’agit d’invisibiliser une parole.
Il est dès lors plus facile de renvoyer le mouvement des Gilets jaunes à une révolte sans cause et sans but précis. Incapable de faire disparaitre les manifestations, elles les recouvrent doublement : d’une part dans l’espace médiatique en l’enfermant dans un conflit pour le bon usage de la ville en concurrence avec la « souffrance des commerçants » ; et d’autre part dans l’espace public urbain en censurant les mots d’ordre, slogans et interrelations. C’est en définitive une dépolitisation de la protestation. La manifestation est en quelque sorte renvoyée à un caractère « barbare » dans la première acceptation du terme, elle n’a pas le droit de cité. Le cœur de la bataille réside dans sa reconnaissance comme entité pensante et parlante. Dans la capacité légitime des personnes assemblées à dire le bon et le juste, le mauvais et l’injuste, en définitive à construire une vision du réel. L’opération revient à essayer de cacher le soleil avec ses mains, mais elle parvient pour le moins à maintenir la légitimité à dire des tenants du pouvoir et de leurs alliés. Elle les maintient dans la course, évite leur destitution complète et leur permet de passer l’orage.

Gazage massif allées Jean Jaurès, 15 décembre 2018.

La gentrification, la ségrégation, les inégalités territoriales sont tout à la fois des conséquences et des facteurs de l’exploitation et des dominations. Il est aussi aujourd’hui relativement admis que l’artificialisation des terres et certaines formes d’urbanisation participent à l’aggravation des effets du changement climatique [22]. Il est moins évident que la forme des villes conditionne les formes et les moyens de la mobilisation politique. La possibilité de se rassembler, de se parler, de faire du commun est fortement impacté par l’aménagement. Ici, c’est l’usage qui prime sur la conception. Le mouvement des Gilets jaunes a montré comment les ronds-points pouvaient devenir, contre toute attente, des lieux de sociabilité. Reste que ces grands espaces libres conditionnait cette possibilité. De par leur situation, au cœur des circulations quotidiennes et par leurs reproductions sur tout le territoire qui a rendu possible une identification donnant une force symbolique de ces occupations.

Manifestation des Gilets jaunes, centre ville, 23 mars 2019.

Faire en sorte d’exclure des usages n’est donc pas du tout anodin d’un point de vue politique. Exclure les manifestations du centre-ville, les dépolitiser en les réduisant à du bruit, à de la saleté, n’est pas une simple opération de police. C’est une intervention profonde sur la manière dont nous nous percevons comme société tout en imposant des manières de penser comment nous devons collectivement envisager le changement. Le centre métropolitain est une vitrine où doit se réaliser —devenir réel— l’idéal d’harmonie qui maintient le statuquo pour la continuité de la croissance et de l’accumulation capitaliste.

L’objectif : transformer ce qui existe —l’enchevêtrement autonome d’évènements que constitue la sociabilité urbaine— en ce qui devrait exister. Il s’agit de matérialiser dans l’espace les idéaux officiels en ce qui concerne la ville, à savoir les valeurs abstraites de l’urbanité comme manière correcte d’occuper et d’employer la ville ; autrement dit, de passer de citadin à civilisé. [23]

C’est d’autant plus paradoxal quand on songe que les métropoles sont le lieu de concentration du pouvoir économique et politique et qu’elles tiennent donc en cela un rôle crucial dans la continuité de la catastrophe en cours. Les manifestations ordonnées dans l’espace et le temps qui leur est assigné doivent laisser exister un espace central, indemne, dédié exclusivement aux commerces et aux divertissements. Les protestations passent et « la vie » continue. L’aménagement projette dans l’espace un partage entre ce qui compte et ce qui ne compte pas. Ce qui relève des choix et des conflits est maintenu en périphérie, alors que commerces et divertissements sont la centralité et l’âme même de l’urbain. Cette mise à distance de la politique comme conflit favorise la désinhibition [24] qui normalise l’insoutenable à l’ère du capitalocène, maintenant l’inaction et l’impuissance tant face à la question sociale qu’écologique.

La ville doit devenir durable et se présente comme LA solution à la catastrophe en cours enjoignant chacun·e à prendre sa part. Le projet Toulouse Euro Sud-Ouest visant à construire un centre d’affaire près de la gare est pour cela exemplaire. Ce sera le thème du prochain article qui sera aussi la clôture de cette série, mais pas sa conclusion.

[1Arlette Farge, Un espace urbain obsédant. Le commissaire et la rue à Paris au XVIIIème siècle. pp. 7-21 les révoltes logiques, n°6, Paris, 1977. p. 21

[2« Scénographies pour un simulacre  : l’espace public réenchanté », Espaces et sociétés n° 134, no 3 (29 septembre 2008) : 67‑81.

[3J’utilise ici le terme de pacification dans son usage contre insurrectionnel. Il est moins question de faire la paix que de maintenir par une guerre, non déclarée et d’intensité variable, les indésirables à distances. Voir Mathieu Rigouste, « L’ennemi intérieur, de la guerre coloniale au contrôle sécuritaire », Cultures & Conflits, no 67 (15 novembre 2007) : 157‑74, https://doi.org/10.4000/conflits.3128.

[4Si les manifestations des gilets jaunes ont remis la question au centre, celle-ci avait déjà fait, en 2015, l’objet d’une tribune intitulée « Manifester aujourd’hui c’est risquer de finir en prison » Je choisi ici la date de 2007 lorsqu’un étudiant, Johan Celsis, est éborgné par un tir de flashball par la BAC lors d’une manifestation.

[5Utilisé de manière régulière depuis 2012 environs mais officialisé en 2017. Il s’agit de viser un groupe de manifestant·es considéré·es comme dangereu·ses et de concentrer les forces d’intervention, CSI et BAC, autour d’eux et elles. voir l’article de France3 sur le sujet.

[6Première en date d’une longue série voir le compte rendu consulté le 10 octobre.

[7Sur le même sujet voir Américo Mariani, « Inscription conflictuelle dans l’espace public  : Toulouse, les Gilets jaunes et la bataille du centre », Espaces et sociétés 183, no 2 (2021) : 99‑113.

[8Témoignage d’un manifestant sur le site internet iaata.info. Compte rendu succinct de la manifestation en Hommage à Rémi Fraisse, 2 novembre 2014 consulté le 12 juin 2024.

[17Ce qui, au vu du nombre de blessé·es parmis les manifestant·es, est tout de même un peu étrange. L’usage de la violence contre les manifestations et les occupations dans les mouvements sociaux est aujourd’hui indiscutable.

[19Gilets jaunes, les commerçants toulousains se battent pour survivre la Dépêche 16 Juin 2019, consulté le 12 juin 2024.

[20Le Préfet Guyot, Toulouse a toujours été un foyer de contestation, La Dépêche. 17 juin 2019, consulté le 12 juin 2024.

[21Les oubliés d’Urbains Vitry, Effacements. Histoires toulousaines, Les Étaques, Lille, 2022. Le titre de la partie est d’ailleurs empruntés à l’un des chapitres du livre. Le livre est disponible en pdf ici.

[22L’aménagement du territoire, la qualité des constructions, l’urbanisation de zone inondable et bien entendu l’artificialisation sont des éléments aggravants par exemple lors de la catastrophe de Valence en Espagne fin octobre 2024 ou à Mayotte fin décembre 2024.

[23Manuel Delgado, L’espace public comme idéologie, Les réveilleurs de la nuit (Toulouse : CMDE, 2016), 12.

[24Prise en compte du danger et normalisation de celui-ci, j’emprunte l’expression à Nelo Magalhães Accumuler du béton, tracer des routes. Une histoire environnementale des grandes infrastructures, la fabrique, 2024, p. 107. Il l’emprunte lui-même à Jean Baptiste Fressoz, L’apocalypse joyeuse : une histoire du risque technologique, Édition du Seuil, 2012.